Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Sur le fil de la vie

Sur le fil de la vie
11 novembre 2007

Chapitre 4 : Un peu plus tôt, chez les Chebbel

37

DING-DONG !!

 Aniava laissa retomber son bras le long de son corps. Elle changea de jambe d'appui en maudissant la gravité et la lenteur qu'on mettait à lui ouvrir la porte d'entrée, ce qui ramena ses pensées à ses chaussures : "Quelle idée j'ai eue d'enfiler ces tortures ambulantes… Des talons !".

Mais, ce qu'elle n'osera pas avouer, c'est qu'elle a eu une ou deux remarques sur sa tenue "pyjama de grossesse" et ses baskets, et que c'est donc poussée par une fierté que certains pourraient trouver déplacée qu'elle décida d'entamer son huitième mois talons au pied.

 Enfin, retentit derrière la porte un bruit de galopade annonciateur de délivrance.

38retouch_e

 

"Aaaaaahhhhhh, enfin !"

 La porte s'ouvrit sur une petite fille, sa nièce Lou, qui sauta de joie en voyant sa tante.

"Tatie Ania, tatie Ania !! T'as su qu'on était chez grand-mère ? T'as vu maman ? C'est si gentil, tu viens nous voir !!"

La petite se dandinait et sautait de joie devant la malheureuse Aniava qui ne souhaitait qu'une chose : s'asseoir.

"Heu, ma puce, je répondrai à tout ça tout à l'heure, tu me…"


39r

Une voix douce retentit derrière la petite fille et Lou fut gentiment, mais fermement écartée de la porte d'entrée.

"Allons, Lou, tu ne te rends pas compte que ta tante Aniava veut rentrer et s'asseoir ? Laisse nous donc passer."

Anita, la maman d'Aniave et Ymaëlle releva les yeux vers son aînée. Comme souvent, celle-ci contempla sa mère avec admiration. Elle souhaitait ardemment vieillir avec l'élégance de sa maman. Mentalement, elle se reprit :"Mûrir, on dit, mûrir, pas vieillir"

Anita tendit la main vers l'intérieur de la maison :

"Tu rentres ? Je suppose, voyant ta tête, que tu es crevée.

-Tu n'imagines même pas, maman !" acquiesça sa fille en s'engouffrant dans la maison.

40


"Aaaahhhh ! Aniava soupira d'aise en s'installant dans le confortable canapé de ses parents. Oh, ce que j'ai mal aux pieds !

-Ma fille, si tu veux mon avis, tu te tortures bien pour rien….

-Je sais maman, je sais…

Entre temps, Maïa avait rejoint sa sœur et les deux petites joignaient leurs voix pour avoir des nouvelles de leurs parents :

-Alors tatie, t'as vu maman et papa ? Comment va papa ?

Maïa rajouta timidement :

"Il est guéri papa ? Maman m'a dit que j'irai lui dire que je l'aime quand il sera guéri.

-Moi aussi, moi aussi, je veux aller lui dire !" répondit en écho sa sœur.

Aniava baissa les yeux, le visage parcouru d'un bref éclair de souffrance. Sa mère, qui comprit tout de suite, posa une main réconfortante sur son bras.

41

Aglaé Chebell prit alors la parole, soulageant sa fille de cette étape délicate. 

"Vous savez les filles, l'hôpital n'était pas encore prêt à nous donner des nouvelles, ils veulent être sûrs de ce qu'ils vont dire, alors ça prend un peu de temps, vous comprenez ?

Quelques bougonnements lui répondirent, mais de toute manière, Aglaé n'attendait pas réellement de réponse.

"Allons, allez donc jouer avec Luke, il doit s'ennuyer de vous, tout seul en bas. "

Les deux petites filles capitulèrent et s'éloignèrent d'un air maussade. Les deux femmes gardèrent un silence qu'Aniava ne rompit que lorsque retentirent les pas des fillettes dans l'escalier.

"Tu leur as menti, tu sais.

-Je sais, ma fille, je sais, j'ai été lâche, mais elles apprendront les mauvaises nouvelles bien assez tôt."

42

Sur ces paroles, Franck Chebell, le père d'Ymaëlle et Aniava fit irruption dans la pièce. Il embrassa rapidement sa fille et s'enquit des nouvelles :

"Alors, comment va-t-il ?"

Le regard d'Aniava se perdit douloureusement dans le vide. 

"Pas bien, papa, je le crains.

-Quoi ? Qu'est-ce qu'il a ?

-Quand on est arrivées ce matin, Yma était pleine d'espoir, elle était persuadée que tout allait bien, c'est ce que lui a dit le docteur la nuit dernière. Mais à peine on a vu les infirmières de l'accueil qu'on s'est doutées que quelque chose n'allait pas."

Un silence s'ensuivit, silence respecté par les auditeurs qui laissaient Aniava regrouper ses pensées. Elle reprit :

-Nous avons ensuite trouvé le docteur qui s'occupe de lui, et en gros, il nous a expliqué que des complications imprévues avaient l'air de se produire et qu'il n'était pas réveillé."

43

"Pas réveillé ?!" Son père sursauta. "Mince alors, c'est donc grave ?

-Il y a un diagnostic ? intervint Aglaé.

-Et bien en fait, le docteur nous a amené à la chambre d'Ulym pour qu'Yma puisse le voir, et puis il nous a dit qu'il l'emmenait passer un scanner. Je suis restée avec Yma jusqu'à ce que je me souvienne au dernier moment que j'avais rendez-vous moi-même chez le toubib. En sortant, j'ai appelé le secrétariat de l'hôpital et on m'a dit qu'Ulym passait toujours ses examens. Et me voilà ici, d'autant que j'étais épuisée, je voulais me poser quelque part…

-Bien sûr, ma chérie, c'est normal, dans ton état, ça te fait même beaucoup de choses dans la journée.

-Je suis bien d'accord, oui, approuva son père d'un ton réprobateur. Il surveillait la grossesse de sa fille aînée avec attention car il portait peu d'estime au père de cet enfant.

-Cela dit, reprit sa mère, Yma doit être toute seule là-bas, je vais passer un coup de fil vite fait et je ferai un saut à l'hôpital. Toi, Aniava, ordre de te reposer !"

44

Aglaé Chabell joignit aussitôt le geste à la parole. Elle se dirigea vers le téléphone d'un pas vif et composa le numéro de l'hôpital qu'elle avait relevé précédemment.

Franck rejoignit Aniava sur le canapé et tenta de la réconforter, car il la sentait ébranlée par les événements récents. De leur place, ils entendirent une partie de la discussion d'Aglaé.

"Oui, bonjour madame, Aglaé Chebell, mon gendre Uylm Genallu est hospitalisé dans vos locaux, je cherche à savoir où il en est, il passait récemment des examens… … Mmmhhh, oui, bien sûr je patiente… … … D'accord, oui. Ma fille est auprès de lui normalement… … Oui, d'accord, je – mmmhh, bien sûr, je comprends que vous ne communiquiez pas ces informations au téléphone, je vais venir de toute façon… Merci bien, au revoir"

45
 

Aniava et son père la rejoignirent, espérant glaner quelque nouveau renseignement. Aglaé les regarda, faisant la moue.

"Ils ne m'ont pas appris grand-chose. Je sais qu'Ulym vient juste de terminer tous ses examens, je vais donc aller jusqu'à l'hôpital essayer de réconforter ma pauvre Ymaëlle."

Elle regarda son mari avec tendresse : "Je suis désolée, mon chéri, je t'abandonne avec les petits, mais…

-Mais il n'y a pas de mais, l'interrompit son mari. Tu dois y aller pour être avec elle, je m'occuperai des petits monstres jusqu'à ce soir.

-Mais je peux rester ici moi, intervint Aniava.

Ses parents la regardèrent :

-Toi ? Mais enfin chérie, tu devrais rentrer chez toi te reposer, je te dépose en passant si tu veux, même, je pense que tu en as assez fait pour aujourd'hui…

-Oui, mais je pourrais garder les petits pendant que vous êtes à l'hôpital, ça ne me dérange pas…"

46

"Et puis je préfère rester ici, ajouta-t-elle d'une toute petite voix. "

Son père fondit immédiatement et serra sa fille dans ses bras.

-Ooohh, ma petite chérie, bien sûr, si tu veux rester, tu restes, je te ramènerai plus tard. Mais attention, il n'est pas question que tu restes pour garder les enfants, je reste ici de toute façon, toi tu as entendu ta mère, tu te reposes !

-Ok, entendu papa, et merci de ne pas m'obliger à rentrer, répondit-elle l'air penaud.

-Bien, sur ce, répliqua Aglaé, je vais vite filer, je vous appellerai de là-bas pour vous donner des nouvelles !

-Entendu, lui répondit son mari en l'embrassant doucement. Dis lui bien qu'on pense à elle et à Ulym, et ne t'inquiète pas pour ici, je gère. Occupe toi d'elle, et surtout, tiens nous au courant de ce qu'il peut se passer."

Publicité
30 octobre 2006

Je fermai les yeux. Moi qui croyais dur comme fer

29

Je fermai les yeux. Moi qui croyais dur comme fer que j'allais retrouver mon Ulym, la désillusion était cruelle. A nouveau, mon esprit fit un aparté étrange… Je me remémorai un de mes anciens amis qui riait en regardant les séries à l'eau de rose à la télé : il qualifiait ce genre de circonstances d'"ascenseur émotionnel"… C'est étrange, les choses auxquelles on peut penser dans des moments pareils… Tellement que j'ai préféré ne pas m'attarder là-dessus !
J'ai rouvert les yeux et j'ai demandé :
"Est-ce que je peux quand même le voir ?
-J'allais justement le voir, on ne va pas tarder à l'emmener au scanner, vous n'avez qu'à venir avec moi. Nous l'avons sorti des soins intensifs pour l'instant."

30

Le médecin partit vers l'ascenseur. Nous lui avons emboîté le pas, Ania et moi. Ma sœur avait glissé un de ses bras sous le mien, elle ne disait rien, mais je voyais ses grands yeux anxieux tournés vers moi. Je tentais de lui faire un petit sourire pour la détendre, mais ce fut trop dur. Arrivés devant la chambre d'Ulym, le docteur Chambot ouvrit et s'effaça pour nous laisser entrer, refermant la porte derrière nous.

Ça y est, je l'avais devant moi. Mon Ulym, mon premier amour, le père de mes enfants. Emue, je m'approchais de lui. Aniava s'assit en rentrait, me laissant m'avancer seule, alors que le médecin contournait le lit.

Il me regarda, je me sentais si bête, j'étais fixée, rigide, devant Ulym, ne sachant plus quoi faire.
"Madame Genallu, dit-il d'une voix douce, vous pouvez vous approcher de lui, le toucher, ou encore lui parler. Je vais vous laisser avec lui, je reviens dans une dizaine de minutes et on le montera au scanner"

Je relevai les yeux sur le docteur Chambot et murmurai un merci. Alors qu'il sortait de la chambre, je me penchai et embrassai la joue de mon mari. C'était chaud, un peu piquant car il n'était pas rasé, mais si doux… Je m'assis à côté du lit et lui pris la main. Là aussi, c'était si doux. J'avais très envie de pleurer mais je me suis retenue. C'est idiot, mais j'avais l'impression que pleurer, ce serait abandonner, et que ça nous porterait malheur, et je ne voulais surtout pas gâcher la moindre chance.

31

La dizaine de minute s'écoula très vite. Ania, pudique, était discrètement sortie pour me laisser seule avec mon aimé.
L'arrivée des brancardiers me sortit d'une situation perturbante : je me sentais si gauche, si inutile à côté de ce corps inerte ! Je lui tenais la main, mais n'osait lui parler. Pour dire quoi ? Pour lui dire que je suis là ? Il ne m'entend même pas ! Avec un certain soulagement, je me suis donc poussée, et j'ai laissé les brancardiers sortir le lit d'Ulym de sa chambre pour l'amener au scanner.

Silencieusement, je les suivis. Le docteur me vit et me proposa de me laisser accompagner Ulym dans la pièce du scanner pendant que les brancardiers l'installaient pour l'examen. Le voir si fragile, prêt à être avalé par cette grande machine bruyante m'effraya un peu plus. Alors, je ne voulais plus partir, je ne m'en sentais pas de l'abandonner. Mais je ne savais pas non plus quoi faire, je me sentais si godiche à rester plantée à fixer son visage !

32

"Madame Genallu ?"
C'était le médecin qui m'appelait.
"Excusez-moi, mais vous ne pouvez pas rester dans la pièce pendant l'examen. Rejoignez moi donc ici.
-Très bien, j'arrive."

A son invitation, je m'assis donc à ses côtés, devant une console pleine de boutons et de lumières clignotantes qui allait disséquer mon Ulym, et probablement me dire ce qu'il avait. L'effroi resserra une novelle fois sa prise sur mon ventre. A mes côtés, le docteur commentait paisiblement les opérations :
"Voyez, là il rentre dans la machine. Celle-ci va faire une série de photos de son cerveau, pour nous montrer si il y a un problème"
Son cerveau. L'information jaillit violemment dans mon cerveau à moi.
- Son cerveau ??!! Docteur, vous n'aviez pas parlé d'un problème avec son cerveau !!

33

"Ahem"
Le regard du docteur se fit fuyant, l'espace d'un instant, puis il revint se planter droit dans mes yeux.
"Madame Genallu, c'est ce que j'essayais de vous faire comprendre tout à l'heure. Votre mari n'est pas inconscient pas hasard, il y a une raison… Il a pu être trop choqué, il peut saigner par une blessure interne, ce qui priverait son cerveau d'oxygène et pourrait l'endommager."

Mes doigts se crispèrent sur le plastique blanc de la console.
-Dites moi donc tout, docteur, de quoi peut-il souffrir encore ?
-Mais il y a de nombreuses possibilités, vous savez ! Nous devons faire ces examens avant que je puisse vous en dire plus, ce que je vous disais à l'instant, je ne vous le disais qu'à titre d'exemple. Simplement, je préfère vous préparer au fait que votre mari puisse avoir… ahem… des séquelles
- Des séquelles…"

Je laissais ma phrase inachevée. Je venais de replonger dans le brouillard. J'ai attendu en silence que l'examen s'achève. En silence, oui, car je ne voulais plus rien entendre. Rien entendre qui pourrait blesser Ulym. Lorsque les brancardiers se sont chargés de le dégager de la machine, je les ai suivi, toujours en silence.

34

Ulym fut ramené directement dans sa chambre. Brièvement, le médecin s'arrêta dans l'encadrement de la porte pour dire :
"Madame Genallu, je vais interpréter le scanner de votre mari avec le radiologue. Soyez sure que dès que nous saurons quelque chose de nouveau, je vous préviendrai."
Le docteur Chambot regarda les grands yeux levés vers lui. Pauvre fille, elle est si jeune, trop jeune pour apprendre les nouvelles que je risque de lui apprendre, pensa-t-il. Impuissant à l'aider plus, il se contenta de terminer sa phrase avec un petit sourire et de serrer brièvement le coude d'Ymaëlle, mettant toute la sympathie qu'il s'autorisait à éprouver pour ses patients dans ce petit geste.

La porte de referma sur le docteur. Je m'y adossais en soupirant. Un rapide coup d'œil sur la pièce : un lit, un gisant, et un fauteuil. Tiens, et un papier.
Je me dirigeais rapidement vers ce papier, c'était un mot d'Ania :

Désolée, Yma, je n'ai pas pu t'attendre, j'ai un rendez-vous médical pour ma grossesse. Je repasse dès que je peux. Je t'embrasse, tiens le coup, Aniava

Je décidai donc de m'installer dans le fauteuil. Je ne sais même plus si j'ai attendu longtemps ou pas, c'était comme la nuit dernière, le temps paraissait s'écouler… je ne sais pas, moi, différemment… A nouveau, je me noyais dans des milliers de pensées, elles allaient même trop vite pour que je m'arrête sur l'une d'entre elle. Heureusement.
Ma "rêverie" fut stoppée par une infirmière qui vint me prévenir que le docteur Chambot voulait me voir. Lentement, je me levai et la suivis. J'allais enfin savoir.

35

"Entrez, entrez, madame Genallu, et asseyez-vous, je suis à vous !"
Le docteur tria hâtivement quelques dossiers sur son bureau, et commença à parler :
"Bien, heu… Avec le radiologue, nous avons soigneusement analysé le scanner qu'a passé votre mari ce matin. Ahem, les nouvelles ne sont pas très bonnes"

Coup de poignard dans mon ventre.

Péniblement, je répondis :
"Allez vous finir par me dire ce qu'il a ?
-Bien sûr Madame. En fait, votre mari a du se cogner la tête en tombant. Dans la nuit, nous n'avons rien détecté, mais ces choses là peuvent ne pas se voir tout de suite. Ce choc a provoqué la rupture d'un petit vaisseau dans le cerveau, il a donc saigné à l'intérieur de son crâne. Sur les radios, on voit très nettement un hématome extra dural avec déviation de la ligne médiane.

*silence*

36

"Que… Qu'est-ce… Qu'est-ce que ça veut dire docteur ?"
Je reconnaissais à peine ma propre voix, tellement elle était étranglée.

- Et bien pour l'instant, ça signifie que votre mari est dans le coma…
- LE COMA !! Vous ne m'aviez pas parlé de ça ! Qu'est-ce que vous allez faire pour lui ?! Sortez-le de là !"
La rage m'habitait. Comment osait-il parler de coma d'un ton si calme ? Comment osait-il rester là devant moi alors que mon mari a besoin de lui ?

"Madame Genallu, calmez-vous s'il vous plait ! Je dispose de peu de temps pour vous expliquer la situation, laissez-moi parler !"
Douche froide. Je me rendis compte que dans la colère, je m'étais levée. Je me rassis donc.
"Madame, je dois opérer votre mari rapidement. Il faut traiter cet hématome avant qu'il n'ait fait des dégâts.

- L'opérer ? Ça va le réveiller ?
- Si tout se passe correctement, les chances qu'il se réveille sont nombreuses.
- Les chances qu'il se réveille ? Vous voulez dire qu'il existe des possibilités qu'il reste dans… dans le coma ?
- Oui madame. Elles sont faibles, mais elles existent. "

Ma tête oscilla vers l'avant. Il fallait que j'arrive à digérer tout ça. Le docteur m'interrompit une fois de plus dans mes pensées, d'une voix radoucie :
"Madame Genallu, si vous n'avez pas d'autre question, il faut que j'aille au bloc opératoire. Votre mari doit être prêt, il ne faut pas que je le fasse attendre.
-… Oui… très bien docteur, allez-y. Je… J'attends les… les nouvelles."

30 octobre 2006

Chapitre 3 : Complications

21

MMmmmhhhh… Que se passe-t-il ? Mmmhhh... Un bruit strident, pénible. Il finit par chasser les derniers lambeaux de mes rêves et à m'extirper des brumes apaisantes du sommeil.Le téléphone ? Encore ! Mais quelle heure est-il ?? Un coup d'œil par la fenêtre m'informe qu'il fait encore nuit. Encore nuit, mais on est presque en hiver. Je vérifie sur mon radio-réveil : 8h30. Ah, que je me sens lasse, ma nuit fut si courte, quelques heures, à peine.
Soudain, la réalité me frappe de plein fouet : Ulym ! Et moi qui vérifie l'heure alors que c'est peut-être l'hôpital qui m'appelle !
Vite, sans prendre la peine d'enfiler une robe de chambre, je me précipite décrocher ce téléphone qui me tire du sommeil pour la deuxième fois de la nuit.

22

"Allo ?
- Allo Yma, c'est Ania !"
Ah, Aniava, ma grande sœur. Bigre, pour être aussi matinale, elle doit être au courant !
"Bonjour, Ania, répondis-je en étouffant un bâillement.
- Heu, maman vient de m'appeler pour me mettre au courant. Comment va-t-il ?
- Et bien j'ai vu le médecin qui l'a opéré dans la nuit, il m'a rassurée. Il a une cheville cassée et des contusions partout, mais ça devrait aller.
- Oh mon Dieu que je suis soulagée ! Maman n'a pas pu me dire grand-chose, j'ai crains le pire !
- Oh ça, pour imaginer le pire, t'inquiète pas, je vois bien ce qui a pu te traverser l'esprit…
- Oh oui, excuse moi, j'imagine que tu as du passer des heures pénibles… tu fais quoi là ? J'ai l'impression que je te réveille, tu retournes te coucher ou tu vas à l'hosto ?
- Non, maintenant que je suis réveillée, je vais me préparer et y retourner"
Petit silence
"Tu veux que je vienne avec toi ?"
Je sentais Aniava hésitante. Cadette d'une fille à qui tout réussissait, j'avais passé les dernières années à tenter d'affirmer ma personnalité et mon indépendance.
"Bien sûr, repris-je, ça me ferait très plaisir. Tu passes par la maison avant, on prendra un café.
-OK, reprit Aniava, la voie rassurée. Je me prépare et j'arrive !"

23

J'en profitais moi aussi pour rapidement passer sous la douche et appeler maman pour lui demander de garder mes petits aujourd'hui encore. A peine avais-je raccroché qu'Aniava toquait à la porte. Heureuse de la voir à mes côtés, je l'accueillis avec effusion, et la pris dans mes bras.
"Ania, je suis contente de te voir !"
Non, je ne suis pas si démonstrative d'ordinaire, mais j'étais à fleur de peau. Ania dut le sentir car elle me rendit doucement, affectueusement, mon étreinte.
"Mais moi aussi petite sœur, je suis toujours contente de te voir. Mais, reprit-elle en riant, il ne faut pas serrer si fort, j'ai l'impression de ne plus respirer avec ce ballon qui me sert de ventre !"

Je le relâchais et la contemplais en souriant. Toutes les femmes ne vivent pas la grossesse de la même façon, et je trouvais que cet état embellissait ma sœur. C'est mon aînée, mais elle a eu une vie un peu insouciante jusqu'ici, donc il d'agit de sa première grossesse."Rentre, vite, je t'en prie ! Allez, viens, on va prendre un petit café !
-Ah non ! Aniava m'arrêta du geste. Tu sais que je suis les recommandations des médecins à la lettre, et ils m'ont dit "pas de café". Mais je prendrais bien une infusion !"

24

"Ah oui, c'est vrai, je te prépare ça tout de suite !"

Je mis l'eau à bouillir et le café à couler. Pendant que le tout chauffait, j'interrogeais Aniava sur l'absence de Cram, le père du bébé et aussi le meilleur ami d'Ulym.

"Dis-moi, Cram bosse aujourd'hui ? Je me suis posé la question quand je t'ai vue arriver seule. Il viendra peut-être le voir plus tard, non ?
-Yma, bien sûr que Cram viendra voir Ulym, il a été tout retourné quand je le lui ai appris ce matin."

Je remarquais que ma sœur avait le regard fuyant, subitement. Elle se mordillait également la lèvre inférieure, ce qui est un signe indiscutable de problème chez elle.
"Ania, qu'est-ce que tu ne me dis pas ?
-Que… Quoi ? Mais… heu… je ne vois pas…
-Ania, la coupai-je, je te connais.
-Ecoute, je ne veux pas t'embêter, tu as assez de soucis…
-J'en aurai encore plus si je sais que ma sœur en a et qu'elle les garde pour elle."
Indécise, Aniava regarda vers le sol. Finalement, elle releva la tête et planta ses yeux dans les miens :
"Si Cram n'est pas là maintenant, c'est qu'il m'évite un peu en ce moment. Ça ne va pas très fort pour nous deux."
Sans me laisser le temps de réagir, elle ajouta, dans un seul souffle :
"Maintenant, tu sais ce qu'il se passe, n'en parlons plus s'il te plait. Je n'ai pas envie d'en dire plus, et toi, tu dois te concentrer sur Ulym."
Dubitative, j'acquiesçais de la tête et me tournais vers mon café.

25

Aniava finit rapidement son infusion tandis que je sirotais mon café brûlant. Un silence gêné perdura quelques instants… Que dire ? Si Ania ne voulait pas en parler, je n'allais pas la forcer, mais savoir que son couple était en péril m'embêtait beaucoup. Elle qui avait toujours eu tant de succès auprès des hommes, s'était stabilisée vers la fin de ses études et sa grossesse me paraissait sceller cette union dans la pierre.

Interrompant le cours de mes pensées, Aniava se leva brusquement et alla laver sa tasse. Elle me rejoignit dans le salon, histoire de me remuer un peu, comme elle a toujours si bien su le faire :
"Allez p'tite sœur, tu t'bouges un peu ? Y'a ton homme qui t'attend quand même !"

Je venais de retrouver l'Aniava insouciante que je connaissais, un petit sourire vissé au coin des lèvres. Je lui souris en retour et me levais également. Mais ça n'était qu'un sourire de circonstance. Egoïstement, je n'avais pas envie de plonger dans ses problèmes amoureux. Pas maintenant. Pas avec Ulym qui m'attendait à l'hôpital.

26

Après un trajet tout de même moins mouvementé que la nuit précédente, me revoici devant l'hôpital. En plein jour, je me sentais moins perdue, moins démunie devant cette grande bâtisse blanche.
Et puis, j'étais confiante ! Ania était avec moi, j'allais retrouver mon homme, je pourrais le bichonner à mon aise.

Je me laissais aller à rêvasser à sa convalescence. Je projetais tout un programme dans ma tête : petit déjeuner au lit, toilette, et quand il le pourrait, une petite balade dans le jardin… Il avait intérêt à se laisser faire cette fois ! Chaque fois qu'il est un peu malade, il ne m'écoute pas, n'en fait qu'à sa tête, et va quand même au boulot, malgré mes protestations ! Mais cette fois, il n'aura pas le dernier mot : pas de travail avant que le médecin ne l'autorise !

27

Arrivée dans le hall, je pressais le pas, suffisamment pour faire râler Ania qui avait récemment adopté une démarche de canard qui me faisait beaucoup rire.
"Yma ! Tu penses pas à moi, hein !
-Allez Ania, lui répondis-je en me retournant, plus que quelques mètres, et nous serons presque au but !"
Rieuse, je me tournai vers les infirmières de l'accueil. Maëva, l'infirmière avec qui j'avais discuté la nuit dernière était toujours là. "Fichus horaires !" me dis-je en mon for intérieur.
"Bonjour ! Je suis Yamëlle Genallu, mon mari est rentré cette nuit, j'aimerais le voir s'il vous plait !"

Maëva tourna la tête vers moi. Ses yeux fatigués par sa nuit de travail, d'abord inexpressifs, s'agrandirent imperceptiblement. Je compris alors qu'elle me reconnaissait, qu'elle se souvenait de la nuit passée, et aussi que quelque chose ne tournait pas rond…
"Heu… oui, bien sûr, tout de suite madame Genallu… Hum, je vais voir le docteur immédiatement, il est là-bas derrière…"
Et elle fila à toute allure.

Visiblement, Aniava aussi trouvait que c'était louche, car elle se rapprocha de moi pour mieux observer Maëva qui parlait tout bas au médecin.
"Qu'est-ce qu'elle peut bien lui dire ?" glissa-t-elle dans mon oreille.
Je n'ai pas répondu. Je n'osais même pas imaginer ce qu'elle lui disait. Car j'avais vu les yeux de Maëva s'agrandir. Même si le moment n'a duré que le temps d'un souffle. Je l'avais vu. Et je savais que quelque chose était arrivé. Et depuis, j'avais l'impression de voir le monde extérieur depuis un télescope, je me sentais loin, si loin… J'avais peur, tout simplement.

28

Maëva ramena le médecin et se retrancha rapidement derrière son ordinateur, feignant de ne plus me voir.
"Je le reconnais ce toubib, je l'ai vu hier soir… Zut, comment est-ce qu'il s'appelle déjà ? Pas moyen de me rappeler son nom…"
Mes pensées tourbillonnaient dans ma tête. Du coin de l'œil, j'ai vu Ania me regarder fixement, puis j'ai senti une vive douleur au bras : elle me pinçait au sang !

Alors, j'ai repris pied dans la réalité. Un peu comme une grande respiration qu'on reprend après avoir fait une apnée. Je réussis à cadrer mon regard sur le médecin (mais oui ! docteur Chambot !) et m'aperçus qu'il avait déjà commencé à parler.
"… complications, mais pour savoir, il va me falloir faire des examens supplémentaires."

Il avait l'air d'avoir fini son discours. Je vis Aniava, l'air angoissée, piétiner d'un pied sur l'autre, regardant alternativement le médecin, puis moi. Honteuse, je dus me résoudre à demander :
"Heu… Docteur, pardonnez-moi, pourriez-vous répéter ? Je n'ai pas… heu… entendu le début."
Le médecin me jeta un bref coup d'œil, pas même surpris. Il doit avoir l'habitude je suppose.
"Je vous expliquais que contrairement à nos attentes, votre mari n'a pas repris connaissance. Il semble que son inconscience soit relativement… hum, comment dire ? Profonde. Hier nous n'avons pas vu de lésions internes, mais il est possible qu'il en ait. Ceci entraînerait des complications, mais pour savoir, il faut que je lui fasse subir des examens supplémentaires."

13 mai 2006

Je n'ai pas pu autant travailler sur ce blog que

Je n'ai pas pu autant travailler sur ce blog que je l'aurais souhaité.

Mais à présent, le voir sans liens vers mes histoires favorites me déplaît fortement. Il a l'air, comment dire ? Tout nu, quoi !!
Mais je ne veux pas non plus bacler cette page importante à mes yeux. Aussi, pour l'instant, la pub est encore assurée par mon fidèle blog des Histoires d'Elise.

C'est par ici.


Quand j'en aurai (enfin) le temps, je me ferai plaisir et vous ferai un belle page de lien !! :D


13 mai 2006

Roh, vous voulez me faire un peu de pub chez vous

Roh, vous voulez me faire un peu de pub chez vous ? Mais c'est trop gentil ça ! Allez, dans ce cas, je ne me fais pas plus prier, voivi les bannière de "Sur le fil de la vie". Je vous en prie, servez-vous ! ;)

petitebanni_re


bouton_fildelavie

Publicité
13 mai 2006

Chapitre 2 : L'accident

10

Mon cœur s'emballa immédiatement. C'était forcément en rapport avec Ulym, il n'était pas rentré !
"Que… que... qu'y a-t-il ??? bredouillais-je péniblement.
-Madame Genallu, je vous appelle des urgences du CHU."
Un silence. Mon dieu, pourquoi ne parle-t-elle pas ? Mille pensées se bousculaient dans ma tête, toutes plus horribles les unes que les autres. La femme reprit :
"Il y a environ deux heures, nos services ont été appelés pour un accident s'étant produit près d'un commerce ouvert toute la nuit dans le centre-ville. Nous avons ramené la personne aux urgences pour la soigner, il s'avère qu'il s'appelle Ulym Genallu. Est-ce votre époux ?"
A la mention d'un accident, des larmes avaient commencé à couler et un nœud se serrait violemment dans mon ventre. Dans un souffle entrecoupé de sanglots, je répondis :
"Oui, c'est mon mari, dites-moi ce qu'il a, dites-moi… s'il est encore en vie !!
-Madame, je sais que c'est dur, mais essayez de vous calmer. Les médecins n'ont pas fini de s'occuper de lui, et tout ce que je peux vous dire par téléphone, c'est qu'il est en vie, et que le pronostic vital est favorable…
-Très bien, la coupai-je, reniflant, j'arrive de suite.
-Madame, madame, prenez-le temps de vous ressaisir, n'allez pas vous blesser…"

 

11

 

 

La suite se perdit dans le vide, j'avais déjà lâché le téléphone.
Pas un instant à perdre, mon esprit ne cessait de projeter des visons d'Ulym, le corps ensanglanté, allongé sur d'affreuses tables en inox. Je n'ai pas vraiment réfléchi, sur le coup, une seule chose m'importait, c'était de le rejoindre. Cependant, je ne pouvais laisser les enfants. J'ai donc foncé au premier les tirer du lit en catastrophe. Inutile de dire que les filles ont été passablement affolées, et moi peu compréhensive. Une seule chose comptait : rejoindre l'hôpital.

Galvanisées par mes ordres secs et bref – et probablement par mes larmes qui coulaient, maintenant que j'y pense – les filles retournèrent dans les habits qu'elles avaient quitté, quoi ? Quelques heures plus tôt, quand notre vie était encore heureuse et ordonnée. J'en profitais pour habiller Luke à la va-vite, prenant en fait à peine le temps de le réveiller.

 

12

Grâce à cet empressement, nous sommes arrivés à l'hôpital un peu plus d'une demi-heure après le coup de fil. Grâce au ciel, devrais-je aussi dire, car j'ai roulé, d'une part très – trop – vite, d'autre part j'étais dans un état second, tentant d'écarter mes visions d'horreurs pour me concentrer sur la route.

Il était donc presque deux heures du matin quand nous avons poussé la porte des urgences. En entrant, un frisson parcourut ma colonne vertébrale, et le nœud dans mon ventre se resserra un peu.
"Calme-toi, pensai-je, fais le pour les enfants. La dame a dit pronostic vital favorable"
Pff, comme si ces mots tellement… tellement… froids et impersonnels pouvaient décrire mon Ulym, ma joie de vivre, mon amour !!

N'arrivant pas à me ressaisir, je m'avançais vers l'accueil, les larmes inondant toujours mon visage.

 

13

Deux femmes s'occupaient de l'accueil, une qui paraissait débuter sa carrière, l'autre plus âgée.
"Je suis Ymaëlle Genallu, vous m'avez appelé au sujet de mon mari. Où en est-il ?"
Fi des protocoles. Je ne vais certainement pas m'en embarrasser, il faut que je sache, il faut que je le voie !
"Madame Genallu ?! C'est moi que vous avez eu au téléphone tout à l'heure"
C'était la jeune fille.
"Vous m'avez fait tellement peur tout à l'heure, j'ai crains que vous n'ayez un accident !
-Mon mari… " Ma voix mourut sur ces mots, je ne voulais pas discuter, je voulais qu'elle me dise !
"Heu, oui, et bien écoutez, je n'ai pas grand-chose à vous dire de plus, le médecin l'opère toujours.
-Comment ça on l'opère ? Mais dites moi, enfin ! Dites moi, où est-il blessé, est-ce grave, je ne sais pas moi, dites moi quelque chose !!"
Ma fureur débordait. J'avais envie de prendre cette fille par les épaules et de la secouer ! Comment ça, rien de plus à me dire ? C'est ce qu'on va voir !

Les deux femmes échangèrent un regard. La plus âgée prit la parole :
"Madame, nous comprenons votre désarroi, je peux peut-être discuter de ça avec vous, mais, regardez la salle d'attente derrière vous, je crois qu'il est préférable d'éloigner les jeunes oreilles…"

 

14

Ciel ! Cette femme avait raison ! Quoi qu'elle ait à m'annoncer, je me devais de protéger les enfants, il s'agissait de leur père.
Tenant toujours Luke, je me dirigeais donc vers les fauteuils de la salle d'attente. Je posais Luke et m'agenouillai au niveau des filles.
"Maïa, Lou, vous êtes de grandes filles, vous voulez bien garder Luke pour maman quelques instant? Je ne serai pas loin, mais je dois parler aux dames."
Deux grandes paires d'yeux bleus effrayés se levèrent vers moi. Maïa, toujours la  plus entreprenante, prit la parole :
"Maman, papa ne va pas bien ?"
Les larmes que je voyais grossir dans ses yeux tandis qu'elle me posait cette question ne m'aidèrent guère à contenir les miennes qui roulaient toujours sur mes joues.
-Ecoutez, mes petites puces, je ne sais pas comment va papa, ce sont les dames là-bas qui vont me le dire. Papa a eu un accident et si je veux avoir de ces nouvelles, restez ici avec Luke, s'il vous plait."

C'est moche. C'est presque du chantage. Mais tous ces obstacles entre la vérité et moi me font faire n'importe quoi. Cependant, les filles baissèrent la tête. Maïa, d'une voix chevrotante, me dit d'y aller, que sa sœur et elle garderaient Luke.
Vivement, je me relevais et filais vers l'accueil. J'étais sûre d'avoir vu l'éclat d'une larme sur la joue de ma fille, mais je n'ai pas pris le temps de la consoler. Je sentais qu'on aurait tout le temps plus tard.

 

15

 

"Madame, s'il vous plait, pouvez-vous me dire ce qui est arrivé à mon mari ??
-Je vais vous dire tout ce que je sais : nous avons eu un appel provenant d'une superette…
-NON ! Sa santé ! Dîtes-moi ce que je dois savoir !!" la coupai-je brusquement.
La personne ne parut pas s'offusquer de ma brusquerie. Elle reprit son récit :
"Il semble qu'il ait été renversé par une voiture qui roulait trop vite. Lorsqu'il est arrivé, les médecins l'ont immédiatement pris en charge, et les infirmières du bloc opératoire nous ont fait passer son portefeuille pour qu'on vous appelle. Elles nous ont dit très peu de choses, seulement qu'il n'était pas mortellement blessé, et que donc, les médecins avaient bon espoir"

Ouf. Le soulagement qui m'inonda fit flageoler mes jambes et je dus me retenir au comptoir pour ne pas tomber.
"Je… heu… Excusez-moi, d'avoir été si vive… J'étais, heu… folle d'inquiétude, je crois".
L"infirmière la plus âgée me regarda avec un sourire chaleureux et me rassura :
"Vous savez, nous avons l'habitude. Il est difficile d'annoncer ces choses là dans le calme. Si vous voulez, je peux monter au bloc pour voir s'il y a de nouvelles informations.
-Je vous en serai extrêmement reconnaissante, oui.
- Maintenant, si je peux me permettre un conseil, vous avez là 3 jeunes enfants qui devraient dormir à l'heure qu'il est.
-Heu... oui, je n'ai pas trop su… heu, j'ai préféré les prendre…
-Vous avez bien fait. Mais étant donné que la garderie de l'hôpital est fermée la nuit, n'y a-t-il personne que vous puissiez joindre pour les garder ?
-A cette heure ? heu, je ne sais pas…
-Les grands-parents, peut-être ?"
Diable, ma cervelle refusait de tourner correctement ! Pourquoi n'y avais-je pas pensé ! Bien sûr, que je pouvais appeler mes parents !
"Oui, vous avez raison, j'appelle tout de suite ma mère."

 

16

J'appelai donc maman dans la minute. Comme on peut l'imaginer, à 2 heures du matin passé, ça n'a pas été sans mal que je lui ai expliqué la situation. Mais, par chance, elle a réagi vite et, habitant à proximité du CHU, elle est arrivée peu de temps après.
"Ymaëlle, ma chérie, qu'est-ce qui se passe, je n'ai pas tout compris au téléphone !"
En voyant les larmes qui s'étaient remises à couler sur mon visage, elle s'approcha et tendit les bras pour m'enlacer.
J'essuyai mes larmes d'un revers de main et ébauchai un piètre sourire :
"C'est Ulym, maman, il a été renversé par une voiture
- OH !!"
Maman ouvrit de grands yeux et plaqua une main sur sa bouche
"Mon Dieu, est-il… ?
-Il est en train d'être opéré. Les médecins ont dit qu'il devrait s'en sortir"

En répétant ces phrases ô combien réconfortant, je lus le soulagement sur le visage de ma mère. Soulagement qui n'avait rien à voir avec celui que je ressentais encore ! J'avais tellement eu peur !

 

17

 

"En fait, repris-je, j'aurai besoin que tu ramènes les enfants chez toi
-Oh ! Les enfants, je ne les avais pas vu. Tu les as amené ici ?? A cette heure ??
-Oui, maman, tu sais, quand l'hôpital m'a appelé, je n'ai pas beaucoup réfléchi…
-Oui, je comprends, bien sûr. Et bien écoute, que veux-tu ? Je les ramène tout de suite et je reviens ?
-Non non, attends, je t'ai déjà fait lever au milieu de la nuit. Rentrez tous, remets-les au lit, moi je vais rester ici jusqu'à… heu, en fait, je ne sais pas. Peut-être jusqu'à ce que j'ai un peu plus de nouvelles.
-D'accord, très bien, je les emmène, effectivement, ils ont l'air fatigués les pauvres choux. Appelle-moi demain matin, tu veux, pour me donner des nouvelles
-D'accord maman, pas de souci
-Très bien. Bon, et bien les enfants, vous venez avec Mamie ?"

 

18

Après avoir rassemblé la petite troupe, ma mère parti installer Luke dans son siège auto. Maïa en profita pour se glisser près de moi et me serrer très fort. Je m'accroupis et lui rendis son étreinte. Qu'il était bon de serrer ma fille dans ses bras en ce moment !
"Maman, me chuchota-t-elle à l'oreille, Papa va guérir, hein ?"
Je la regardai dans les yeux et lui souris. Enfin un vrai sourire !
-Ma puce, les infirmières m'ont dit que ton papa est malade pour l'instant. Les docteurs vont le soigner, et ils m'ont dit qu'il irait mieux. Il faudra peut-être attendre un peu, c'est tout !"
Enfin, Maïa aussi retrouva le sourire. Elle se rapprocha de mon oreille pour y glisser :
"De toute façon, papa, il est avec des docteurs qui le soignent et avec toi qui l'aime. Il est obligé de guérir !!"
Je me relevai en lui ébouriffant la tête :
"C'est sûr ma petite puce ! Et puis tu viendras le voir pour lui dire que toi aussi tu l'aimes. Allez, maintenant, file rejoindre Mamie.
-D'accord !!"
Et elle fila sur les traces de sa grand-mère.

 

Et m'autorisant enfin un peu d'espoir, je m'assis dans la salle d'attente, attendant que l'infirmière partie aux nouvelles redescende.

 

19

Je ne saurais dire aujourd'hui combien de temps j'ai attendu. Parfois, j'ai l'impression que c'était des heures, parfois, le temps m'a semblé filer à une vitesse étourdissante. Sans doute était-ce le ballet incessant des pensées morbides tournant dans ma tête qui créait cet effet. Car l'infirmière m'avait rassurée, mais moi, être de chair, de sang et surtout de sentiments, je ne pouvais empêcher une partie de mon esprit de douter. Et cette partie ne serait rassurée que quand j'aurais vu Ulym, quand je l'aurais touché, respiré. A ce moment-là, je pensais encore que mon esprit ne saurait être en paix que lorsque j'aurais satisfait à la reconnaissance tactile qu'exigeait mon corps.

Enfin, après ce temps finalement indéterminé, le "ding" de l'ascenseur retentit. Avec soulagement, je levais les yeux vers cette infirmière qui était montée aux nouvelles. "Maëva", indiquait son badge. Fébrile, je la laissais venir à moi.
"Madame Genallu, votre mari vient de sortir du bloc opératoire et est en réanimation. Je ne sais pas si vous pourrez le voir ce soir, mais je viens de voir le médecin qui l'a opéré, vous pouvez aller lui parler, il est au troisième étage.
-Merci, merci, merci beaucoup, madame. J'y monte tout de suite !"
Maëva sourit :
"Allez vite, et demandez le docteur Chambot"

 

20

Troisième étage. Un couloir sombre, gris et froid. Je me dirige vers le premier homme en blouse blanche que je croise et demande le docteur Chambot.
"C'est moi, madame, vous devez être la femme de l'homme accidenté ?
-Oui, je suis Ymaëlle Genallu. Alors, docteur, dites moi ce qu'il a !
-Et bien, votre mari a finalement eu une certaine chance. Le choc a été violent, mais aucun organe vital n'a été atteint. Il avait de vilaines plaies qui l'ont fait beaucoup saigner, mais nous nous en sommes occupés. Il a des contusions sur tout le corps et une cheville cassée. Mais nous avons réparé tout ça…
-Oh mon dieu, merci docteur, le coupai-je. Je me suis fait un souci monstrueux, j'ai cru que le pire était arrivé ! "
A nouveau, des larmes coulaient sur mon visage, mais c'était des larmes de soulagement.
"J'aimerais beaucoup aller le voir, docteur.
-Ecoutez, ça, je ne préfère pas trop. Il vient juste d'être admis en réanimation, c'est un service délicat, et la politique de l'hôpital est d'éviter que les familles y rentrent.
-Ah. Bon…"
De petites rides autour des yeux du docteur laissaient deviner un sourire que je supposais paternel. Il reprit :
"Ne vous faîtes pas de souci, madame, il est entre de bonnes mains. Rentrez chez vous, allez vous coucher, et revenez lui demain, fraîche et pleine d'énergie !"

 

Et il tourna les talons. Ce doit être une technique de médecin, ça. Quoi qu'il en soit, je me sentis subitement vidée de toute mon énergie. Je sentais le poids des émotions de la soirée retomber brutalement sur mes épaules.

 

Un peu dépitée, je rappelais l'ascenseur pour rentrer chez moi.

27 mars 2006

Chapitre 1 : le jour où tout bascula

1

Cette journée avait pourtant si bien commencé. Comment pouvais-je me douter qu'elle marquerait un tel tournant dans ma vie ? Comment aurais-je pu imaginer que tant de tristesse allait en découler ?

 

Pourtant, c'était un jour comme les autres. Ulym, mon époux depuis bientôt 6 ans, se préparait à partir au travail. Il travaille comme consultant dans une entreprise de produits cosmétiques. Ne me demandez pas ce qu'il fait réellement, je n'en sais rien. J'ai fait des études, en même temps que lui, mais j'ai très peu travaillé. Nous nous sommes mariés et avons eu une famille à assumer très tôt, donc nous avons décidé qu'il commencerait sa carrière, et que l'un de nous, moi en l'occurrence, resterait à la maison.

Comme tous les jours, donc, je l'embrassais avant qu'il ne parte travailler. Il avait l'air d'excellente humeur ce matin là, et me retourna mon baiser avec une lueur coquine dans l'œil.
" A ce soir, ma belle…
- A ce soir, mon amoureux, travaille bien…" 

2

Comme tous les jours, après le départ d'Ulym, j'ai préparé les filles et je les ai amenées à l'école. Sur la route, nous faisions des projets pour l'après midi, car c'était mercredi, et je comptais aller en ville avec elles.

J'ai ensuite occupé ma matinée à de menus travaux ménagers, et surtout, à pouponner mon Luke. Lui ne va pas à l'école, mais l'année prochaine, il faudra que nous y songions. Alors, je profite avec délice de ces moments d'intimité que la grande maison vide nous offre. C'est un petit garçon tellement espiègle ! Il est sans arrêt en train de sourire, et je fonds chaque fois que je le regarde, retrouvant dans ses traits, le visage tant aimé de mon Ulym.

31

Vers midi ce jour là, j'ai récupéré les filles à leur école. Maïa et Lou sont deux fausses jumelles, complices comme on l'est à cet âge là, comme je l'étais avec ma sœur, Aniava. Elles se sont très récemment piquées de l'idée de me donner un coup de main dans les travaux ménagers. Surprenant, mais j'avoue que ce n'est pas pour me déplaire ! J'ai pu en profiter pour me préparer à sortir et appeler une nounou pour garder Luke.

Et bien oui, l'après midi, il fait une sieste, et les filles étaient trop pressées de sortir pour attendre. Peu importe, après tout, ce n'est pas forcément l'idéal de faire les boutiques avec des enfants en bas âge. Aussi, j'ai accédé à leur caprice. Je crains particulièrement ces bébés qui braillent dans les magasins, et même si Luke le fait de moins en moins, on n'est pas à l'abri d'une petite crise…

4

Chose promise, chose due, une fois la nounou arrivée, Maïa, Lou et moi embarquions dans notre vieille Smoogo direction la zone commerciale. Sur la route, les filles ne cessaient de chanter "On va acheter des jouets, on va acheter des jouets !". Je vous laisse imaginer l'ambiance de la voiture ! Mais il ne faut pas croire que ça me dérangeait, au contraire. Il n'y a pas si longtemps qu'une sortie en ville avec les jumelles n'est plus une expédition hasardeuse nécessitant la présence d'Ulym… C'est qu'elles sont remuantes, ces petites !

 

L'après-midi que nous avons passée fut merveilleuse. On a butiné de boutique en boutique, les filles me demandant malicieusement diverses petites choses. Oh, bien sûr, elles savent que papa et maman ne peuvent pas tout acheter. Mais pour quelques petits jouets, j'ai accepté de sortir mon portefeuille.

 

Oui, ce fut une magnifique après-midi. Comment aurions-nous pu imaginer que le soir même, notre destin tournerait ? 

5 

Lorsque nous sommes revenues, un message m'attendait sur le répondeur. C'était Ulym qui m'annonçait qu'une fois de plus il resterait tard au boulot, et se répandait en excuse. C'est vrai que ça arrive souvent, mais il a du batailler pour obtenir ce poste, car il n'avait pas d'expérience, et j'ai parfois l'impression qu'il doit mériter ce travail chaque jour.

A 19h30, j'ai donc servi le dîner aux filles. Elles étaient encore tout excitées par notre après-midi, et me racontaient en détail les histoires qu'elles avaient inventées avec leurs nouveaux jouets. Elles ont l'habitude de ne pas voir leur père à dîner, mais comme il se rattrape dès qu'il est à la maison… 

6

La soirée s'écoulait paisiblement. Les filles, ces petites coquines, sachant que je dis rarement non pour une petite demi-heure, étaient installées devant la télévision. Tout en débarrassant la table, je les écoutais commenter leur émission favorite, la Sims Académie. Moi, je ne cours pas vraiment après cette émission, mais bon… si ça leur fait plaisir, une petite demi-heure ne leur fera pas de mal…

"Maman, maman !! Regarde, viens voir comme Sonia est bien coiffée ! Et comme elle chante bien, c'est notre préférée !
-Parle pour toi, lui répondit Maïa. Ma préférée à moi, c'est Brenda, elle est vraiment trop jolie…
-Mais elle chante mal !
-Et alors ? Je m'en fiche, moi, c'est ma préférée !!!
-Chut, les filles, intervins-je. Vous n'allez pas vous disputer pour savoir quelle est votre préférée, tout de même ?"
Après un petit conciliabule à mi-voix, elles finirent par me répondre :
"Maman, tu sais quoi ? Pour nous départager, tu peux peut-être nous laisser voter avec ton téléphone portable ? Comme ça, on vote toutes les deux et on se dispute plus !
-Roooohh, vous êtes deux coquines, je vous ai déjà dit : vous avez le droit de regarder, mais on n'utilise pas le forfait de maman pour voter !"

7

Maïa et Lou n'ont pas insisté. Elles ont beau être jeunes, elles savent que si je les laisse regarder, il n'est pas question de dépenser des sous pour ces âneries.
J'ai alors rapidement fini de débarrasser les tables et je les ai couchées tout aussi rapidement. Je me suis mise à l'aise et j'ai appelé Ulym, car je sentais poindre un mal de tête, et je n'avais plus aucun cachet à la maison.
"Allo mon amour ?
-Yma, mon cœur ! Je rentre tout de suite, je suis en train de fermer mon bureau…
-Tu me rassures, je vais enfin te retrouver. Mais dis-moi, sur la route du retour, tu ne pourrais pas passer par la petite épicerie du centre ? Elle est ouverte très tard et ils vendent de tout là-bas.
-Bien sûr, qu'est-ce que je te ramène ?
-J'ai une migraine qui débute, et je crois qu'ils vendent de l'aspirine.
-Il me semble aussi que je t'en ai déjà pris là-bas. Je m'occupe de ça, va vite te coucher, j'arrive pour te border et avec une bonne aspirine pétillante pour madame !"
Je ne pus m'empêcher de pouffer.
"Merci beaucoup, j'ai hâte de vous avoir, ton aspirine et toi…
-A tout de suite, je suis là dans 20 minutes.
-Merci mon cœur, je t'aime.
-Moi aussi, ma belle."
 

8

Mais je n'avais pas envie de me coucher tout de suite. Je suis redescendue regarder un peu la télé, j'avais envie d'attendre le retour d'Ulym. Vingt minutes, ça allait vite passer.

Je zappais consciencieusement quelques minutes, sans trouver de programme vraiment fascinant. Assommée par cette migraine, je finis par m'allonger sur le canapé pour regarder une série policière que je suivais de loin en loin. Mais la fatigue aidant, j'ai du finir par m'assoupir. En effet, quand j'ai rouvert les yeux, la nuit était tombée et une nouvelle émission avait débuté.

Un peu désorientée, je relevai la tête. Je venais d'identifier ce qui m'avait réveillé : le téléphone sonnait.
 

9

La tête encore bourdonnante, je me relevais péniblement. J'éteignis la télévision avant de déposer la télécommande et m'extirper du canapé. En m'approchant de téléphone, je jetai un coup d'œil à la pendule : une heure du matin. Qui pouvait m'appeler ? Et comment se fait-il qu'Ulym ne soit pas encore rentré ?

Je tendis la main pour décrocher le combiné, et le portai à mon oreille. Une voix féminine résonna :
"Allo, madame Genallu ?
-Oui c'est moi.
-Excusez-moi de vous déranger à cette heure, mais j'ai une grave nouvelle à vous annoncer"


C'est à ce moment précis que mon destin, celui d'Ulym, et celui des enfants bascula.

 

27 mars 2006

Sommaire

Bienvenue sur "Sur le fil de la vie"

Cette fois-ci, je m'organise tout de suite avec un sommaire. C'est à partir d'ici que vous pourrez accéder aux mises à jour.

sommaire1

chap11

chap21

chap3

chap4

26 mars 2006

Les mises à jour sont en bas de page Le 11

Les mises à jour sont en bas de page

bienvenue12

intro2
intro21

barre

Le 11 Novembre


Chapitre 4 : Un peu plus tôt, chez les Chebbel


Les chapitres précédents :

Chapitre 3 : Complications

Chapitre 2 :
L'accident 

Chapitre 1 : Le jour où tout bascula


publisims_logo

 

[]

Publicité
Sur le fil de la vie
Publicité
Derniers commentaires
Publicité